Hélinand de Froidmont (1160-1230)
Marie, Rose mystique


La rose a deux qualités qui la font ordinairement apprécier : à savoir sa beauté et les services qu’elle peut rendre. Sa beauté tient à deux choses : son coloris et ses contours. Sa couleur rose est particulièrement belle, quand les pétales prennent cette teinte feu si agréable, laissant plus bas, à la naissance des pétales, un peu de blanc très délicat et très mat. Cependant cinq pétales courts et verts pointus au bout, dressés comme des pyramides entourent la base des pétales et la cachent.
Telle est la beauté matérielle de la rose. Parlons maintenant de sa beauté mystique.
Ce blanc exquis à la naissance des pétales de la rose, c’est la pureté du cœur de la Vierge Marie. Elle s’origine, si je peux dire, à la naissance des affections, comme au pied des pétales. La Vierge a toujours veillé sur les sens de son corps d’une quintuple garde, abritant sa pureté d’un rempart inexpugnable, et la protégeant de tout ce qui venait de l’extérieur. Elle l’a gardée parfaitement intacte, l’a maintenue jusqu’au bout dans une impeccabilité inaltérable. […].
Ce n’est pas sans raisons que l’on appelle Marie « rose » et « parterre de roses ».
Rose, elle le fut à titre de martyre et de vierge : toute sa vie, en effet, fut un martyre et un modèle d’inviolable chasteté. Elle fut même plus que vierge, et plus que martyre. Plus que vierge, puisque mère féconde : vierge qui conçoit, vierge qui enfante. Plus que martyre, car si elle n’a pas souffert la passion dans sa chair, par son âme, elle a souffert dans la chair de son fils, d’une souffrance non physique, mais spirituelle ; et ce lui fut martyre plus atroce que si elle l’avait subi dans son corps.
Parterre de roses, elle le fut, car elle a donné naissance au Christ, rose et fleur du monde. Il a dit en effet : « Je suis la fleur des campagne » (Ct 2,1). Il est, en toute vérité, une rose, vierge et martyr, roi des vierges et des martyrs.